Toujours en février 2012.
Il y a un sujet qu'il est important d'aborder maintenant, je crois.
Ce sont Les Autres.
Quand une naissance survient dans une famille, il n'est pas rare que divers membres claquent littéralement une durite. Dans mon cas, ce sont mes beaux-parents qui ont occupé ce rôle.
Quand mon histoire avec Monsieur Lambda est devenue sérieuse, mes beaux-parents ne sont pas privés de nous faire savoir qu'ils étaient très impatients que la descendance soit mise en route. A tel point que lorsque nous leur avons annoncé notre projet de mariage, c'est à tout autre chose qu'ils s'attendaient et ma foi je crois qu'on peut dire qu'ils ont été littéralement déçus.
Lorsqu'ils ont su que nous devions passer par la PMA pour avoir un bébé, cela a été un réel désespoir pour eux. Ils ont tenus a être très présents, ce qui était génial pour Monsieur Lambda, mais carrément intrusif pour moi.
Mes propres parents vivent à 800 km de chez moi, et j'ai l'habitude depuis longtemps de ne plus rendre compte de chacun de mes faits et gestes, chose que mes beaux-parents avaient un peu de mal à comprendre, n'ayant pas la même relation avec leur fils.
C'est pourquoi nous avions décidé à l'époque de ne pas trop les impliquer dans notre parcours et nous les tenions informés au minimum. Je savais que je n'avais pas besoin de pression supplémentaire, ni de gérer leur état émotionnel. J'avais déjà bien assez à faire avec le mien.
Quand les enfants sont nés, comme vous le savez, nous n'avons pas vécu une situation classique de naissance et je ne suis pas retournée dans ma chambre avec mes bébés après l'accouchement.
Pourtant mes beaux-parents tenaient absolument à venir me voir, bien que nous n'ayons jamais eu d'affinités probantes.
Dans le contexte où nous étions, je n'avais aucune envie de recevoir de la visite.
Très inquiète pour mes bébés, épuisée par tout ce qui nous est arrivés et ma césarienne, je n'étais pas d'humeur à faire des mondanités surtout que de manière générale je préfère ne voir personne quand je suis souffrante et être tranquille.
Pourtant, sur leur forte insistance et pour ne pas les heurter, j'avais accepté qu'ils viennent et nous leur avions déjà précisé plusieurs fois que les visites de la famille n'étaient pas permises en néonat.
Ils étaient donc venus, étaient restés une heure où je n'avais pu ni me reposer ni être auprès de mes enfants et m'avaient demandé d'un air plutôt accusateur pourquoi j'avais un coussin de grossesse au pied de mon lit.
Leur intention n'était pourtant pas mauvaise, je peux tout à fait comprendre qu'ils étaient très impatients de voir leurs petits enfants, mais sur le moment entre la fatigue et la descente d'hormones, j'avais très mal pris cette remarque qui sous entendait que les enfants venaient dans ma chambre d'hôpital et que j'étais la méchante belle-fille qui les leur cachait.
Autant vous dire que je n'étais pas dans de bonnes dispositions à leur égard.
Dès que nos enfants ont été transférés en néonat, ils nous ont cassé les pieds tous les jours pour savoir quand ils pourraient les voir.
Nous ne savions pas nous mêmes quand ils sortiraient de l'hôpital, et honnêtement on n'avait pas besoin de cette pression.
Mes parents, ma famille, étaient également très heureux de la venue au monde de mes enfants, mais ils ont su contenir leur impatience, attendre le moment où il serait possible de les rencontrer et m'apporter leur soutient à distance.
Bon, peut être que les kilomètres qui nous séparent ont aidé aussi, c'était plus compliqué pour eux de venir me voir et comme je passais tout mon temps en néonat je n'aurais pas pu m'occuper d'eux.
Ceci étant, j'avais donc d'autant plus de mal à accepter l'attitude de mes beaux-parents, qui même si j'en comprenais le fond, me paraissait terriblement égoïste sur le moment.
Il se trouve qu'une cousine de Monsieur Lambda a accouché quelques semaines après moi, à l'hôpital Moisi.
Comme tout s'est bien passé pour elle, elle a pu recevoir toute la famille dans sa chambre pour leur présenter son bébé.
Un jour que j'étais en train de tenir Lorna dans mes bras pendant qu'elle était nourrie par sonde, une infirmière m'a informée qu'un Monsieur voulait me voir.
"- Un Monsieur? Vous voulez dire un médecin?
-Non non, un Monsieur. Il est dans le couloir et il dit qu'il est votre beau-père."
Les bras m'en sont tombés, si je puis dire. Mon beau-père était venu voir la cousine en maternité, et il s'était carrément pointé en néonat.
Croyait il donc qu'il pourrait passer en force voir mes enfants en agissant de cette manière?
Je n'ai pas du tout, du tout apprécié et j'ai demandé à l'infirmière de le raccompagner et de lui réexpliquer le règlement.
Malgré cela, quelques heures plus tard, une autre infirmière est venue me voir et m'a littéralement passé un gros savon en me disant que les visites n'étaient pas permises, que cela mettait tous les enfants de la néonat déjà fragiles en danger et qu'ils avaient autre chose à faire que de gérer les familles.
Je me suis répandue en excuses, mais cela ne m'a pas dispensée d'un bon quart d'heure de morale, comme si j'avais besoin de ça.
J'avais vraiment l'impression d'être une mauvaise élève sermonnée par la directrice de l'école.
Si je relate cet aspect de notre aventure, ce n'est pas pour faire un procès à mes beaux-parents.
Comme je l'ai dit ils étaient plus qu'impatients, et leur façon de l'exprimer a été celle-ci.
C'est un sentiment que je peux comprendre, vraiment, je n'imagine pas quels moments d'inquiétude ils ont dû traverser lorsque nous étions pris dans la néonat.
Disons que je pointe plus la forme que le fond de leur comportement.
Mais voilà, je partage mon expérience et je crois qu'il n'est pas inutile d'expliquer à ceux qui espèrent ou se préparent à être parents que ce genre de chose peut arriver.
Quand on est passé par la PMA, quand on est confronté à la prématurité, on a le nez dans le guidon et on ne pense pas tellement à notre entourage. Je crois qu'il est bon de se préparer à ce type de réactions, pour ménager tout le monde et s'épargner des scènes inutiles.
Alors oui, Les Autres peuvent être envahissants, Les Autres peuvent être pressés et pressants, mais il ne faut pas oublier qu'ils souffrent eux aussi, que la Peine et l'Inquiétude les accompagnent également et que cela explique bien des choses.
Et si vous faites partie de ces Autres qui constituent l'entourage de jeunes parents qui affrontent la prématurité, essayez de ne pas oublier qu'eux aussi sont inquiets, qu'ils ont peur et mal, et que vraiment les restrictions mises en place ne sont pas faites pour vous embêter mais pour le bien des bébés.
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